Divin Abbado

De retour de Pleyel pour la 9è de Mahler.

Je ne sais pas si je vais m'en remettre !

La follissima a écrit:De retour de Pleyel pour la 9è de Mahler.

Je ne sais pas si je vais m'en remettre !

Raconte !

Bah j'ai pleuré les 10 premières minutes et les 15 dernières (sans compter mon coeur qui battait tellement fort que je me suis demandée si mes voisins allaient l'entendre). Dans l'intervalle j'étais dans un autre monde.

La follissima a écrit:Bah j'ai pleuré les 10 premières minutes et les 15 dernières (sans compter mon coeur qui battait tellement fort que je me suis demandée si mes voisins allaient l'entendre). Dans l'intervalle j'étais dans un autre monde.

Mais encore ?

Bah c'était magique, mais je serais bien incapable de faire une critique.

Déjà avant le début, Fofo s'était bien mise en condition en se disant qu'elle allait pleurer dès l'entrée de la Légende Vivante...ça ne s'est pas arrangé par la suite ! Il faut dire que c'est tout de même très impressionnant et qu'il en ressort une sorte de magie. En ce qui me concerne, j'ai beaucoup plus apprécié la quatrième partie, mais cela s'explique, Mahler n'est pas mon compositeur favori et la première partie m'a moins "interpellée", je trouve la musique très "nerveuse", mais cela tient à l'oeuvre et à ma personnalité. Je me sens presque coupable de ne pas adhèrer complètement...Ceci posé, il faut reconnaitre que la version cd ou la version live est très différente et que les "dissonances" qui me gènent beaucoup en cd passent comme une lettre à la poste (sauf en ce moment) avec un tel orchestre et une telle direction. En revanche, la quatrième partie est époustouflante, avec la fin tout en douceur et en "silence voilé" (c'est la seule façon d'exprimer qui me vient à l'esprit), juste un filet de musique dans le silence quasi-total, presque religieux, c'est hyper impressionnant, carrèment, ça serre le ventre et à la fin de la dernière note, on est complètement sous le charme, on aimerait que ça dure, que ça dure...jusqu'au moment où une vieille folle se croit obligée de crier bravo, rompant ainsi partiellement le charme, partiellement seulement, car il a fallu un bon moment même après la fin des interminables applaudissememnts pour retrouver un peu de mouvement et de réflexion. bref on ressort avec l'impression d'être sur un petit nuage....

Quand le génie d'interprètes surdoués croise le génie de créateurs non moins surdoué, cela donne les moments inoubliables que l'on vit intensément avant de les ranger dans notre mémoire dans un petit coin dont ils ne partiront point !

Giustociel a écrit:Quand le génie d'interprètes surdoués croise le génie de créateurs non moins surdoué, cela donne les moments inoubliables que l'on vit intensément avant de les ranger dans notre mémoire dans un petit coin dont ils ne partiront point !

Notre Giusto en version poète....

Babaorome a écrit:

Giustociel a écrit:Quand le génie d'interprètes surdoués croise le génie de créateurs non moins surdoué, cela donne les moments inoubliables que l'on vit intensément avant de les ranger dans notre mémoire dans un petit coin dont ils ne partiront point !

Notre Giusto en version poète....

mais ça n'a rien de poétique

Giustociel a écrit:

Babaorome a écrit:

Giustociel a écrit:Quand le génie d'interprètes surdoués croise le génie de créateurs non moins surdoué, cela donne les moments inoubliables que l'on vit intensément avant de les ranger dans notre mémoire dans un petit coin dont ils ne partiront point !

Notre Giusto en version poète....

mais ça n'a rien de poétique

Si, si...

Ah bon

Giusto, pas contrariant !

Bon, comment dire ? je n'ai pas trop envie d'expliquer pourquoi parce que c'est assez personnel (je sens que vous allez y avoir droit tout de même à l'autoanalyse de comptoir) , mais pour tout un tas de raisons, plein de choses me sont revenues en mémoire et j'ai été chamboulée de l'intérieur par cette musique et ce qu'a fait Abbado.

Ne serait-ce qu'Abbado lui-même.
... Les premiers enregistrements de musique classique que j'ai écoutés viennent de lui.
Petites, avec Nougat nous écoutions ses danses hongroises en boucle, pendant des heures, des jours, des mois, ça a même duré des années et j'y reviens régulièement.
Avec le Faust de Cluytens, son Barbier (avec Prey) est le premier opéra que j'ai vraiment découvert, écouté et adoré, en boucle aussi. On l'a emprunté au moins 15 fois à la cdthèque de notre ville et finalement, c'est le premier cd que je me suis payée (à la fnac ! Je m'en souviens encore) ! C'était cette version que je connaissais par coeur que je voulais et j'étais toute chose tellement j'avais hâte que cet objet soit à moi.
Quelque part, cet homme a complètement conditionné ou déclenché mon amour de la musique classique. Si j'étais tombée sur des enregistrements pourris dirigés par un chef miteux, je n'aurais peut-être jamais plongé dans ce monde comme je l'ai fait.
Donc, oui, je vénère cet homme.

Vous associez ça au véritable génie de sa direction hier soir, au son de l'orchestre, au souffle et aux couleurs, nuances, qu'il a pu donner et j'ai failli crever. Vous rajoutez la violence, les interrogations mêlées d'éclats de vie tout de même de Mahler, la quête de paix, les tourments, le pourquoi etc. et voilà.

Le premier mouvement était splendide et m'a fait remonter dans mes souvenirs. Bizarrement de bons souvenirs. C'est sans doute pour ça que j'ai pleuré au lieu de m'enfoncer dans une sombre dépression.
Le second forcément, j'ai retrouvé ce qui coule dans sa direction, le côté évident et imparable qui emporte tout. La forme musicale et son traitement m'a vaguement fait repenser aux danses hongroises... et si vous voulez, j'ai repensé du coup à des trucs que je n'avais pas forcément oublié mais auxquels je n'avais pas pensé depuis longtemps... comme ma grand-mère qui m'a fait ce cadeau énorme de m'acheter délibérément mon premier lecteur cd "pour que je puisse écouter de la musique quand je le voudrais", à ma mère qui m'achetait des cassettes, des cds, des livres ou qui nous mettait des 33/45tours de musique (et il y avait de tout) et les écoutait avec nous quand nous étions mômes. J'ai repensé au vieux mange-disque et au cd de la biche et de je ne sais quoi, qui servait de prétexte pour faire écouter la musique de Mozart.

Je ne sais pas du tout pourquoi, mais je me suis souvenue de la première fois où je me suis retrouvée toute seule à un cours de natation sans maman. De la trouille que j'ai eu, du sentiment de trahison d'abord d'être abandonnée, puis de la conscience que non, c'était une façon de me lancer progressivement dans la vie (bon, j'avais quoi ? 5 ans ?) et de tout ce que cela implique après de prendre sur soi.

Et plein d'aures trucs plus personnels.

Le dernier mouvement m'a achevée et j'ai arrêté de respirer ou presque pendant le dernier quart d'heure tellement j'étais saisie. Là pour le coup je ne pouvais plus réfléchir. J'étais happée par la musique et ce filet de son qui emplissait pourtant toute la salle. C'était le moment présent et l'émotion brute.

Je suis encore le ventre à l'envers aujourd'hui.

Alors voilà, ce n'est pas un CR et désolée de vous avoir raconté ma vie... mais c'est un moment assez incroyable que j'ai vécu.
Grâce à la musique, c'est allé au-delà de la musique.

Merci de ne pas appeler les urgences psychiatriques, je vais très bien.

Merci d'avoir eu la gentillesse de partager ça avec nous

La follissima a écrit:Bon, comment dire ? je n'ai pas trop envie d'expliquer pourquoi parce que c'est assez personnel (je sens que vous allez y avoir droit tout de même à l'autoanalyse de comptoir) , mais pour tout un tas de raisons, plein de choses me sont revenues en mémoire et j'ai été chamboulée de l'intérieur par cette musique et ce qu'a fait Abbado.

Ne serait-ce qu'Abbado lui-même.
... Les premiers enregistrements de musique classique que j'ai écoutés viennent de lui.
Petites, avec Nougat nous écoutions ses danses hongroises en boucle, pendant des heures, des jours, des mois, ça a même duré des années et j'y reviens régulièement.
Avec le Faust de Cluytens, son Barbier (avec Prey) est le premier opéra que j'ai vraiment découvert, écouté et adoré, en boucle aussi. On l'a emprunté au moins 15 fois à la cdthèque de notre ville et finalement, c'est le premier cd que je me suis payée (à la fnac ! Je m'en souviens encore) ! C'était cette version que je connaissais par coeur que je voulais et j'étais toute chose tellement j'avais hâte que cet objet soit à moi.
Quelque part, cet homme a complètement conditionné ou déclenché mon amour de la musique classique. Si j'étais tombée sur des enregistrements pourris dirigés par un chef miteux, je n'aurais peut-être jamais plongé dans ce monde comme je l'ai fait.
Donc, oui, je vénère cet homme.

Vous associez ça au véritable génie de sa direction hier soir, au son de l'orchestre, au souffle et aux couleurs, nuances, qu'il a pu donner et j'ai failli crever. Vous rajoutez la violence, les interrogations mêlées d'éclats de vie tout de même de Mahler, la quête de paix, les tourments, le pourquoi etc. et voilà.

Le premier mouvement était splendide et m'a fait remonter dans mes souvenirs. Bizarrement de bons souvenirs. C'est sans doute pour ça que j'ai pleuré au lieu de m'enfoncer dans une sombre dépression.
Le second forcément, j'ai retrouvé ce qui coule dans sa direction, le côté évident et imparable qui emporte tout. La forme musicale et son traitement m'a vaguement fait repenser aux danses hongroises... et si vous voulez, j'ai repensé du coup à des trucs que je n'avais pas forcément oublié mais auxquels je n'avais pas pensé depuis longtemps... comme ma grand-mère qui m'a fait ce cadeau énorme de m'acheter délibérément mon premier lecteur cd "pour que je puisse écouter de la musique quand je le voudrais", à ma mère qui m'achetait des cassettes, des cds, des livres ou qui nous mettait des 33/45tours de musique (et il y avait de tout) et les écoutait avec nous quand nous étions mômes. J'ai repensé au vieux mange-disque et au cd de la biche et de je ne sais quoi, qui servait de prétexte pour faire écouter la musique de Mozart.

Je ne sais pas du tout pourquoi, mais je me suis souvenue de la première fois où je me suis retrouvée toute seule à un cours de natation sans maman. De la trouille que j'ai eu, du sentiment de trahison d'abord d'être abandonnée, puis de la conscience que non, c'était une façon de me lancer progressivement dans la vie (bon, j'avais quoi ? 5 ans ?) et de tout ce que cela implique après de prendre sur soi.

Et plein d'aures trucs plus personnels.

Le dernier mouvement m'a achevée et j'ai arrêté de respirer ou presque pendant le dernier quart d'heure tellement j'étais saisie. Là pour le coup je ne pouvais plus réfléchir. J'étais happée par la musique et ce filet de son qui emplissait pourtant toute la salle. C'était le moment présent et l'émotion brute.

Je suis encore le ventre à l'envers aujourd'hui.

Alors voilà, ce n'est pas un CR et désolée de vous avoir raconté ma vie... mais c'est un moment assez incroyable que j'ai vécu.
Grâce à la musique, c'est allé au-delà de la musique.

Merci de ne pas appeler les urgences psychiatriques, je vais très bien.

Ce que tu viens d'écrire et qui me fiche les larmes aux yeux, est exactement l'illustration du potentiel émotionnel de la musique de haut niveau, celle que ceux qui la déteste croient à tort comme intellectuelle uniquement. Alors que lorsqu'on fait l'effort d'en maîtriser le langage, elle nous permet de nous retrouver face à ce que nous sommes. Je connais quelqu'un qui régulièrement médite sur le prélude de Parsifal, dans une version de choix, et qui croit avoir beaucoup fait de chemin durant ces moments. Et dans le même sens, comme dirait Kyrie, la sécurité sociale devrait rembourser Verdi.

La follissima a écrit: Si j'étais tombée sur des enregistrements pourris dirigés par un chef miteux, je n'aurais peut-être jamais plongé dans ce monde comme je l'ai fait.
Donc, oui, je vénère cet homme.

C'est un peu ce qui m'est arrivé au début, quand j'ai voulu écouter de l'opéra, je m'étais abonnée à une collection de vulgarisation, avec des chanteurs inconnus et tout ce que cela peut comporter d'aléas...Si je peux dire, Fofo chérie, que c'est toi qui m'a fait tomber dans la marmite, je peux vous vénèrer, Docteur...

Juste retour des choses en fait. Quand on aime, on a tendance à vouloir faire partager.

Enirac a écrit:Merci d'avoir eu la gentillesse de partager ça avec nous

Tu m'ôtes les mots de la bouche...